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    La Vache Girafe

    La chamade restaurant morzine portes du soleil

    « Nous sommes en 2221.

    Réchauffement climatique oblige, la Reine de l’Alpe, une Pie rouge d’abondance, achève sa mutation.

    Elle est devenue sauvage, elle ne veut plus être la « millième ». Elle a refusé la fierté et la paternité de son éleveur et aspire à la liberté. Elle veut être belle, se faire la belle et surtout être aimée, comme sa lointaine cousine d’Afrique désormais disparue, la girafe.

    Elle a retrouvé sa parure d’antan, ses cornes ont repoussé pour mieux gratter les dernières glaces d’altitude durant les sécheresses d’été.

    Son cou s’est allongé pour mieux respirer au-dessus des fumées de carbone et happer les rares feuilles à la cime des arbres. Ses pupilles sont devenues azur par amour de la libellule bleue qui peuplait autrefois les saines zones humides.

    Elle refuse de se faire taire, son lait n’est plus bon que pour son veau unique, éventuellement. Elle pratique désormais la discipline narcissique du regard de l’autre.

    Elle ne se retourne plus que pour admirer la plastique de ses fesses.

    Le plumeau rigide et agressif au bout de sa longue queue est une vieille réminiscence de mauvais souvenirs de viols réguliers de l’inséminateur. Aujourd’hui il sert à éloigner les mâles trop entreprenants.

    Ses grands yeux maquillés de noir la protègent des rayons solaires. Les couleurs vives de sa peau lui permettent d’être vue de loin au milieu du désert alpestre. Elle se dandine sous le regard de tous ces gentils cons aux grand idéaux, qui rêvent de grands espaces, le cul collé à leurs écrans plus que plasma.

    Elle vit isolée et apaisée dans ce milieu montagnard aride, elle ne rêve plus aux grands pâturages et aux ruisseaux bouillonnants, de peur de redevenir utile.

    Elle a abandonnée avec soulagement et pour toujours ces objets serviles que sont le collier et la cloche, ce tintamarre abrutissant et assourdissant pour celle qui le porte mais ô combien rassurant pour ceux qui n’ont jamais compris le mot « intimité ».

    La Reine de l’Alpe, aussi futile soit-elle, sait quelle qualité de paix apporte le silence. Elle participe désormais, en toute liberté, à la castration du plaisir des hommes.  »

    Ce texte a été écrit par le Chef Thierry Thorens, dans le but de dénoncer le réchauffement climatique. Cette vache-girafe en est le symbole.